La régence de l'Impératrice

L’une des conséquences de l’attentat d’Orsini, perpétré le 14 janvier 1858 contre l’empereur Napoléon III, fut la création d’un Conseil privé comprenant l’Impératrice, le prince Napoléon et les principaux dignitaires du régime. Il pouvait se transformer en conseil de régence en cas de disparition ou d’empêchement de l’Empereur.

Ce conseil de régence fonctionna quand l’Empereur commanda en personne les troupes franco-piémontaises pendant la campagne d’Italie.

En effet, lors de l’entrevue de Plombières le 21 juillet 1858, Napoléon III et Cavour avaient convenu de chasser l’Autriche d’Italie, et de faire de Victor-Emmanuel le roi de l’Italie du Nord, « des Alpes à l’Adriatique ». En échange, le Piémont céderait Nice et la Savoie à la France. Provoquée par le Piémont, l’Autriche prit l’initiative de la guerre. Les troupes franco-piémontaises remportèrent les victoires de Magenta et de Solférino, les 4 et 24 juin 1859, qui libérèrent la Lombardie de la domination autrichienne.
 


Assise sur une estrade surmontée d’un dais, l’Impératrice Eugénie tient le prince impérial sur ses genoux. L’enfant est souriant et lève les yeux vers la Victoire ailée à laquelle il adresse un signe de la main. A la gauche de l’Impératrice se tient le Prince Jérôme. Il est debout, accoudé sur le dossier du fauteuil vide de l’Empereur, où sont posés la couronne et le sceptre.

Au premier plan, au pied de l’estrade, les membres du conseil de régence sont représentés à mi-corps. Ils sont répartis en deux groupes. Dans celui de gauche, on reconnaît le duc de Morny, président du Corps législatif, et monseigneur Morlot, cardinal-archevêque de Paris.

En haut et à droite du tableau, une Victoire ailée, couronnée de laurier, tend un écu ovale où l’on peut lire : « MAGENTA... ANNO MDCC… » (l’inscription est partiellement effacée). Elle vole au-dessus d’un aigle tenant en son bec un rameau d’olivier.

Dans cette œuvre, Pierre-Désiré Guillemet associe l’allégorie au réalisme politique.

La Victoire ailée est une figure allégorique qui, en annonçant le succès militaire de Magenta au conseil de régence, proclame le prestige retrouvé de la France impériale sur la scène internationale. Après le congrès de Paris de 1856, qui efface le congrès de Vienne de 1815, les victoires de Napoléon III en Italie placent la France en position d’arbitre pour que triomphent la politique des nationalités prônée par l’Empereur et la paix en Europe. L’aigle tenant en son bec un rameau d’olivier illustre parfaitement la phrase célèbre prononcée par Napoléon III lors du rétablissement du régime impérial : « L’Empire, c’est la paix ! ».




Statue équestre de Napoléon III (Chateau de Compiègne)


Par ailleurs, le tableau de Guillemet met en scène une situation politique bien réelle. En l’absence de l’Empereur qui dirige les opérations militaires en Italie, c’est le conseil de régence qui gouverne, comme il gouvernera d’ailleurs en 1865 et en 1870. Contrairement à ce pourraient laisser supposer la couronne et le sceptre abandonnés sur le trône vide, le pouvoir impérial n’est pas vacant. L’Impératrice est régente. Elle est assistée du Prince Jérôme – l’oncle de Napoléon III et membre de droit du Conseil – dont la présence symbolise la pérennité dynastique, essentielle dans une situation politique exceptionnelle.

 
 



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